Cabane
Friches + Culturel | Cabane |
Figure imposée : la cabane
Dimension disponible pour la province 2.40 m par 2.40 m, c’est grand encombrant et vraiment pénible à aller chercher.
Des cabanes pour les enfants, à l’heure de l’infantilisation des adultes où le grand kif consiste à se prendre pour des Peter Pan en mal de short vert et de plumes dans le cul qui, pour satisfaire ce prétendu besoin écologique, peuvent louer très cher des logdes dans les arbres, des yourtes gelées, des tepees en plastique… À l’heure où l’on recycle même la conne- rie, il est rassurant de concevoir une cabane pour les enfants. Juste pour les enfants. Un monde à eux, un refuge, un truc où les adultes ne peuvent même pas aller, une chose à leur échelle donc in ni sans bord ni limite qui renvoie à un univers onirique.
On nous fourgue une plaque géante pour faire une toute petite cabane qui ouvre sur un monde géant. Les enfants ne sont ni mièvres ni pastels, ils ne sont ni aseptisés ni formatés, ils sont des joyaux bruts, ils sont violents, ils sont méchants, ils sont sans pitié, ils sont sauvages, ils sont vrais, ils sont sublimes, ils sont excessifs, ils chient, ils pissent, ils rient, ils pleurent, ils aiment sans retenue, surtout, ils sont naïfs, au sens nouveau, ils sont beaux!
Notre rapport au construit doit être plus émotionnel que fonctionnel, il doit restaurer nos repères estompés par le virtuel. Existe t-il une trace plus nette que celle laissée par une couleur, une saveur, un son? Il faut permettre aux enfants de rêver, le rêve est l’essence même du réel. C’est notre seule arme, la plus puissante, la plus efficace pour s’affranchir de la fadeur et de la laideur des contingences qui nous assaillent de toutes parts.
Il n’y a plus de forme préconçue ou prétendue archétypale, il n’y a plus de dedans et de dehors, de clair d’obscur, de frontières, de limites, il n’y pratiquement plus rien. Juste une plaque, percée de trous dans lesquels on vient glisser un mouchoir de papier blanc. Verticale, c’est un paravent, un recto marron un verso douillet, un simple trait pudique pour préserver son intimité. Horizontalement la plaque immaculée devient un territoire sur lequel on a envie de faire des choses délicates et douces, ou de tout arracher pour se moucher. Qu’à cela ne tienne. Ca n’est pas moi qui fais l’histoire et c’est très bien comme ça.
Matthieu Poitevin